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Réconciliation hommes femmes

la naissance de la vidéo The battle is over

15 septembre 2020

Bourreau et victime, victime et bourreau

Novembre 2018 : entendre le message des femmes

Je découvre au détour d'internet la vidéo des femmes aux hommes, et je vois, pour la première fois, des femmes qui témoignent face caméra et qui changent le récit dominant.
Elles racontent une autre histoire : elles aussi, elles usent de la violence et abusent du pouvoir. Elles aussi, elles participent à cette grande roue de la violence hommes-femmes. Quel soulagement, quelle libération.
Enfin la preuve vivante, s'il en était besoin, que oui, les femmes peuvent être violentes, manipulatrices et faire du mal.
Aussi, d'entendre des mères témoigner qu'elles ont utilisé leurs enfants pour combler leur manque d'amour de couple, cela me libère d'un poids, d'une charge, d'une responsabilité. L'enfant en moi comprend que ce n'est pas de sa faute.
Cette vidéo vient apporter une réponse à un vide, vient alléger une peine, vient guérir une blessure très profonde.

Offrir une réponse

J'écris alors à Hannah Milling, à l'origine du projet pour la remercier de cet élan, de ce projet, du message porté par toutes ces femmes qui m'a profondément touché. Comment de simples mots, dits avec intention, conviction peuvent faire en moi l'effet d'une bombe d'amour. J'ai envie d'y répondre. J'ai envie de contribuer à mon tour à faire du bien. J'ai envie de grandir, et dire, là où moi aussi j'ai pu faire du mal. Faire face à la caméra pour reconnaître les zones d'ombres qui m'ont fait agir. Apporter ma voix pour dire que je fais partie de l'autre moitié de l'humanité qui, régulièrement, volontairement, inconsciemment, je participe au cycle de la violence hommes-femmes.

Une toile se tisse

Ainsi Hannah m'oriente vers Bernhardt, son compagnon, qui commence un projet de vidéo des hommes vers les femmes. On réfléchit à quand et comment, on pourrait faire un volet français, filmer des hommes, sur le territoire français, pour ajouter leur pierre à ce projet mondial. Bernhard m'informe que déjà aux Etats Unis, au Brésil, en Argentine et en Allemagne, des hommes ont déjà commencé avec des tournages et des témoignages. Un peu partout sur la planète, le message a réveillé des hommes qui ont envie de répondre, ou en tout cas, de témoigner.
Après avoir retourné le problème plusieurs fois dans plusieurs sens, l'idéal serait que Bernhard vienne en France pour faire ensemble ce projet, nous faisons la proposition à l'événement français les Rencontres du Masculin Sacré qui a lieu à Sauve du 13 au 16 Juin 2019.

Proposer 3 ateliers aux Rencontres du Masculin Sacré

Ainsi, nous proposons 3 ateliers d'1h30 pour donner l'opportunité à des hommes de venir faire face, de partager les endroits, les moments, les événements où ils ont blessé des femmes. Quand, où, comment, pourquoi?
Nous filmerons en tout 56 français qui acceptent de témoigner, de prendre la responsabilité de leurs actes et qui souhaitent s'adresser aux femmes, à la femme qu'ils ont pu blesser ou aux femmes en général pour leur montrer qu'ils ont vu, qu'ils savent, qu'ils voient ce qui les a fait agir, qu'ils l'ont fait par peur, et qu'ils ne souhaitent plus laisser ces peurs agir et avoir raison d'eux. Ils veulent faire différemment. Ils veulent réparer la relation car ils savent que ces comportements ne sont pas satisfaisants.
Nous accompagnons chacun à trouver le ton juste, le message juste pour prendre la responsabilité sans s'effondrer, pour témoigner sans se morfondre. Trouver la justesse de l'énergie, de la verticalité, de la responsabilité :
je suis là, avec mes parties sombres et je me montre. Je me laisse voir. En même temps, je vois les conséquences de mes actes, les dégâts, les traces qu'ont laissé mes actes.
Un chemin périlleux s'ouvre.
Comment atteindre cet endroit de vérité où je me regarde sans me juger. Où je me juge sans me haïr.
Reconnaître que je ne voulais pas cette violence.
Que je n'étais pas maître de moi même.
Comment puis-je aussi me pardonner l'homme que j'ai été?
Comment m'aimer quand je suis capable de détruire?

A la fin des rencontres nous avons la matière que nous cherchions, nous avons les témoignages, quelle que soit l'issue de la vidéo, chacun a pu se positionner et partager un ou des endroits où il a conscience d'avoir blessé les femmes.
Nous profiterons également d'un moment lors des rencontres pour montrer la vidéo à la centaine d'hommes présents.
Un beau et grand moment collectif. Nous ne savons pas où le projet nous mènera, mais il a déjà changé pas mal de choses en moi.

Co-construire la vidéo

Le temps passe et je demande à Bernard comment il compte s'y prendre pour monter la vidéo? Comment transformer ces histoires individuelles en une grande histoire collective? Comment s'écrit le récit de ces hommes nouveaux? Je le rejoins fin novembre 2019 pour 2 jours de montage à Berlin. Nous épluchons toutes les vidéos, pour écouter les messages, les blessures, les histoires. Recevoir toute la confiance que chacun a pu nous transmettre en délivrant son message.
Nous sentons la responsabilité de la tâche.
Comment faire une vidéo marquante, qui va à l'essentiel sans dénaturer le propos de chacun?
Comment répondre aux femmes sans copier leur message?
Comment leur offrir notre sensibilité, notre vulnérabilité?
Comment leur montrer ces parts de nous que nous cachons bien volontiers car hideuse?
Comment procéder pour écrire cette grande histoire?

C'est au fur et à mesure qu'apparaîtra cette trame qui nous semble commune. Ce message qui nous relie, ce que nous avons tous en commun. Le pourquoi, le comment, le quoi. Nos histoires varient, nos versions diffèrent, mais un principe commun nous relie.

C'est ce masculin que nous venons dénuder, offrir et montrer.

La guerre est finie. Autre chose commence

La vidéo est un début, une proposition, un élan.
Elle n'est pas parfaite, elle n'est pas complète, mais elle est un premier pas.
Elle ne dit pas tout, elle ne couvre pas tout, elle ne règle pas tout.
Elle propose un beau premier pas, une main tendue, une envie de faire la paix, de balayer devant sa porte, devant notre porte, pour pouvoir être plus en lien, plus authentique, sans nous cacher, sans nous mentir.

Libre à chacun maintenant de contribuer et d'ajouter son message, sa vidéo, d'écrire son bout de l'histoire et de dire, là où lui ou elle a fait mal à l'autre sexe, de le filmer et de le mettre sur lels réseaux sociaux avec le hashtag #thebattleisover